Carnet d’un éducateur spécialisé

J’ai pour origine le Gabon, j’y suis nais et y ait grandi dans une famille aimante. Ayant un statut privilégié, j’ai eu accès très jeune à la culture française, notamment par ma scolarisation dans la région du pays basque et sur Paris. Nous avions une éducation traditionnelle, intergénérationnelle et une mixité culturelle. Nos parents nous ont inculqué des valeurs, des savoirs et l’amour de l’autre. Très rapidement, j’ai été à l’écoute des difficultés des plus démunis, en particularité, des enfants, en mettant en place des activités de solidarités. C’est un des héritages de mes parents, donner avec le cœur et sans intérêt.

Depuis plus de 24 ans, je suis éducateur spécialisé. Ce livre, c’est l’expérience d’une vie professionnelle dans l’éducation spécialisé avec les différents publics, leurs difficultés et leurs besoins. C’est l’occasion d’échanger indirectement avec des professionnels sur ma pratique et d’avoir un retour. Est-ce que nous faisons les mêmes constats sur les difficultés de la jeunesse dans notre société ? La montée en puissance des jeunes en pédopsychiatrique ? La place de l’éducateur dans le processus de soin ? Les réponses ou outils apportées à leurs besoins ? C’est aussi un livre en direction des parents, des proches, en quête pour appréhender les difficultés de leurs enfants. J’ai commencé sans diplôme, par des petits remplacements, dans un foyer de l’Aide Sociale en l’Enfance. C’est comme ça que j’ai appris le métier sur le terrain, avec l’équipe pluridisciplinaire, les partenaires sociaux, les jeunes et les familles. L’apprentissage ne fut pas de tout repos. Il y a eu des moments de doutes et de remises en cause. Mais je n’ai pas lâché et pas craqué. Ce fut long, dur, mais très formateur. Je me suis appuyé sur mes ressources, notamment familiales, pour en faire une force face aux obstacles de la vie. Sur de mon projet professionnel, j’ai passé toutes étapes, le concours, la formation et l’obtention du diplôme. Ce livre n’est pas une Revenge sur la vie. Mais plutôt un témoignage de résilience sur la fatalité ou le destin. Rien n’est inscrit ou écrit sur du marbre. Si on a l’écoute, l’amour, un sens dans sa vie, on peut s’aimer avec sa différence, ses qualités, ses défauts et aimer la vie. Et l’écoute, la parole sont des outils très importants de l’éducateur pour accompagner la personne à sortir de l’ombre à la lumière.

Extrait du livre : 

Aller à la rencontre d’un adolescent en souffrance, n’est pas une chose aisée pour un éducateur et encore moins pour le reste de l’équipe pluridisciplinaire. Cependant, l’éducateur a la formation et les outils nécessaires pour favoriser l’approche des adolescents. Il fait partie du processus de soin. Mais il est identifié par les adolescents comme une personne neutre, ni médicale, ni psychologique ou pédopsychiatrique. 
Selon le profil, la problématique, de la personne, l’éducateur adopte une posture afin de créer la rencontre et un dialogue. Lorsque la personne accepte ma présence, l’échange, on passe aux présentations, de manière réciproque. Je lui parle, de moi (il ne s’agit pas de lui raconter ma vie, mais lui donner des éléments sur lesquels il va pouvoir s’identifier), mes missions au sein du service. Et il fait de même ou préfère que je pose des questions. 
Dès fois, l’humour, la répartie et l’écoute, suffisent à avoir un entretien et à aborder les difficultés. Cela peut arriver au premier ou 2ème entretien. Et pour d’autres, il faut plus de temps. C’est le cas, des adolescents qui sont dans l’opposition à tout. Il faut doser notre présence, sans les brusquer, respecter leurs besoins de solitude. Et attendre, agir par parcimonie, pour qu’ils me sollicitent. Ils ne connaissent pas le service, les professionnels et ont besoin d’un temps d’adaptation. C’est pourquoi, nous allons par étape et à leurs rythmes. La prise d’un traitement, peut aussi changer l’humeur de la personne, favoriser la rencontre et l’envie de réaliser des activités.
L’ennui peut être très problématique. Pour certains patients, il y a un besoin d’occuper le vide. Sinon, le sentiment de mal être peut se traduire par des angoisses ou des idées noires. Lorsqu’il n’y a plus d’activité, notamment, le soir, les week-ends, c’est très difficile. Dans la mesure du possible, l’équipe soignante et les bénévoles prennent le relais. Cependant, ils ne peuvent pas être en activité en permanence. Je pense que les temps seuls, avec eux même, sont nécessaires, pour se centrer sur eux et commencer un travail de résilience. Les visites des parents, des proches et des amis, sont importantes, dans ce processus.